Que prévoit le bugdet de la Sécurité sociale en 2021 ?

décryptage des mesures santé duProjet de loi de financement de la sécurité sociale 2021 PLFSS2021

Tous les ans, à l’automne, sont examinés le projet de loi des finances pour les dépenses de l’Etat et le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, pour les dépenses d’une grande partie de la protection sociale. Ces projets de loi traduisent en mesures concrètes la politique gouvernementale. Nous vous proposons un décryptage des principales mesures de ce PLFSS 2021 en matière de santé.

Un contexte sanitaire et social inédit qui conduit à un déficit record des comptes de la Sécu

Avant de décrypter ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale, il faut se rappeler le contexte particulier que nous vivons cette année. Les prises en charge liées à la Covid-19, le chômage partiel et les licenciements ont pesé lourdement sur les comptes de la Sécurité sociale. La Sécu a joué pleinement son rôle de filet de sécurité en prenant en charge intégralement les téléconsultations, les tests de dépistage, l’achat de masques ou les frais d’hospitalisation.  A cela, s’ajoutent les mesures prises dans le cadre du Ségur de la Santé : revalorisation des salaires de certains soignants, reprise de la dette des hôpitaux.

Avant cette crise sanitaire, le déficit de la Sécu pour 2020 était estimé à 5,4 Mds d’€. Il s’élèvera à 44,4 Mds d’€ ! A cela 2 raisons principales : des dépenses supplémentaires comme évoqué plus haut et d’importantes cotisations sociales non-encaissées (-25 Mds d’€) qui ne sont plus compensées par l’Etat.*
Ainsi, cette année toutes les branches de la Sécurité sociale seront dans le rouge ! ( Cf. Infographie ci-dessous).

Covid19 : déficit des comptes de la Secu par branche n 2020

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Ce déficit record des comptes de la Sécu s’explique aussi par les dépenses exceptionnelles liées à la Covid-19. Le Gouvernement a débloqué 15 milliards d’euros pour aider les établissements sanitaires et sociaux et pour les achats de matériels (masques, tests PCR etc.). En outre, pendant la crise sanitaire de nombreux français ont renoncé ou reporté leurs soins entraînant une baisse de remboursement Assurance maladie et complémentaire santé estimée à 4, 5 Mds d’€.

résumé des dépenses santé exceptionnelles Covid

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*La loi de financement de la Sécurité sociale 2020, prévoit que l’Etat n’a plus obligation de compenser les exonérations sociales. La Mutualité avait dénoncé cette mesure car le budget de la Sécu (indépendant du budget de l’Etat) ne doit pas servir la politique sociale du gouvernement !

L'action de la Mutualité Française Sud !

Nous ne sommes pas d’accord et nous le disons ! Dans toute la région nous nous mobilisons pour dénoncer ce projet de loi en rencontrant des Parlementaires !

Petite liste non exhaustive des parlementaires rencontrés :

Delphine Bagarry Députée et Jean Yves Roux Sénateur dans les Alpes de Haute Provence,

Jean Michel Arnaud, Sénateur et Président de l’association des Maires dans les Hautes Alpes,

– Les Députés Emilie Guerel, Geneviève Levy, Fabien Matras et Cécile Muschotti dans le Var,

Julien Aubert Député et Alain Milon Sénateur dans le Vaucluse

Les principales mesures du PLFSS 2021 : la taxe COVID pour les Mutuelles

Une addition salée : une taxe de 1,5 Md d’€ pour les mutuelles.

Au plus fort de la crise, la Sécurité sociale a pris en charge les frais d’hospitalisation, les téléconsultations à 100 % y compris la part ordinairement prise en charge par les mutuelles. De plus, le report de soins a engendré une baisse des consultations hors Covid, ce qui a entraîné une baisse des remboursements de la part des complémentaires santé. Il n’en fallait pas plus au Gouvernement pour demander aux mutuelles une participation exceptionnelle de 1Md d’€ en 2020 et de 0,5 Md d’€ en 2021 : la taxe COVID (Augmentation de la Taxe Solidarité Additionnelle (TSA), de 13,7 %  à 16,5 % du chiffre d’affaires des mutuelles).

La Mutualité dénonce cette décision qu’elle juge prématurée car le bilan financier réel de la crise n’est pas encore connu.  Elle voit dans cette taxe COVID, un impôt déguisé, une façon détournée de faire payer aux français la crise sanitaire.

Voici les principales raisons de sa contestation :

  1. Les Mutuelles ne vont pas faire d’économies : les personnes qui ont attendu pour des consultations ou des soins n’ont pas renoncé à se faire soigner. Leurs soins vont donc être reprogrammés. L’Assurance maladie et les complémentaires santé n’auront donc pas fait d’économies. Bien au contraire, certaines situations se seront dégradées entraînant des soins plus lourds et plus coûteux. Ce n’est qu’en 2021 que le bilan de ce report de soins sera connu.
    De plus, les mutuelles sont des entreprises à but non lucratif, leur objectif n’est pas de se faire « la cerise » sur le dos de leurs adhérents puisqu’elles réinvestissent leurs bénéfices dans des prestations ou des services aux adhérents. Elles ne versent pas de dividendes à des actionnaires puisqu’elles n’en ont pas ! Les Mutuelles se sont également retrouvées en premières ligne de la crise sanitaire au travers des hôpitaux, EHPAD, centres de santé, crèches qu’elles gèrent.
  2. Les Mutuelles veulent rembourser ce qui a été avancé par l’Assurance maladie ! La situation d’urgence a pleinement justifié que l’Assurance maladie prenne en charge l’intégralité de certaines prestations de santé. Cependant, Thierry Beaudet, Président de la Fédération Nationale de la Mutualité Française qui regroupe l’ensemble des mutuelles a proposé, dès le mois de mai, de rembourser la quote-part avancée par la Sécu. De plus, la Mutualité ne comprend pas la décision du Gouvernement de prolonger de 2 ans, la prise en charge totale des téléconsultations par l’Assurance maladie. La situation actuelle tendrait à un retour à la normale et donc une prise en charge des actes de téléconsultations par l’Assurance maladie et les mutuelles.
  3. Un impôt déguisé qui fait que la santé est plus taxée qu’un hamburger ! En effet, les taxes pèsent de plus en plus sur les cotisations des adhérents. Elles représentaient 5€ par adhérent et par an en 2001 et elles étaient de 76€ en 2012 ! La Mutualité dénonce « une traitement de faveur » injuste puisque les complémentaires santé seront les seules entreprises à participer à cet impôt. Cette taxation est d’autant plus injustifiée qu’elle n’est pas instaurée pour rembourser les avances faites par l’Assurance maladie mais pour combler le déficit de la Sécu.

Aucun autre secteur de l’économie n’est concerné par la mise en place d’une contribution supplémentaire alors que les géants du numérique comme les plateformes de Streaming ou de commerce en ligne ont fait des bénéfices record, le gouvernement choisit de taxer les entreprises de l’économie sociale et solidaire !

4. Enfin, à la crise sanitaire s’ajoute une crise économique et sociale. Beaucoup de travailleurs ont malheureusement perdu leur emploi et selon le principe de portabilité des droits, les mutuelles assurent le maintien de leurs garanties santé et prévoyance. Ce coût de la portabilité va augmenter significativement, d’autant qu’elles font face à des impayés de cotisations de la part des entreprises. Pour autant, fidèles à leurs principes de solidarité et de justice sociale, elles continueront à protéger leurs adhérents économiquement fragilisés.

Les principales mesures du PLFSS 2021 : un forfait "Urgences" incompréhensible dans la situation actuelle

Les députés ont adopté le 22 octobre en séance, le principe du « forfait Patients Urgences ». Il prévoit qu’à compter du 1er septembre 2021, tout passage aux urgences qui ne nécessitera pas d’hospitalisation, sera facturé 18€ au patient. Il remplace l’actuel « ticket modérateur » qui laisse à la charge du patient 20% du coût de ses soins.

La Mutualité estime qu’une réforme de la participation financière du patient pour l’ensemble des prestations à l’hôpital est plus que nécessaire. Elle permettrait à la fois de simplifier le système et surtout de réintroduire de la solidarité et de l’équité dans les restes à charge. Cependant, La Mutualité juge que le « forfait Urgences » que le gouvernement à sorti de son chapeau arrive au plus mauvais moment dans un contexte de crise sanitaire. En effet, la Mutualité craint que cette mesure accroisse encore plus les inégalités d’accès à la santé. Les restes à charge hospitaliers sont aujourd’hui les plus importants pour les ménages comme elle le précise dans son observatoire des inégalités de santé publié récemment. 18€ de forfait pour les personnes les plus fragiles représente un frein manifeste pour aller consulter les urgences.

Pour Thierry Beaudet, Président de la Mutualité Française « même si le Gouvernement a quelque peu rectifié le tir, ce forfait ne doit pas pénaliser les femmes enceintes ou les personnes atteintes de maladies graves qui sont aujourd’hui dispensées de ticket modérateur. Il ne doit pas non plus pénaliser les personnes fragiles qui recourent aux urgences parce que leur médecin traitant n’était pas disponible. »

Les autres mesures du PLFSS 2021 : des moyens insuffisants pour transformer le système de santé et financer le 5e risque

Un financement du Ségur de la Santé qui n’est pas à la hauteur des enjeux !

Le budget proposé pour financer les conclusions du Ségur de la Santé n’est pas à la hauteur des enjeux comme nous l’avions annoncé dans notre communiqué de presse du 24 juillet. La Mutualité estime que le plan d’investissement de 19 Mds d’€ dans les établissements de santé et médico-sociaux est un trompe l’œil car il comprend 13Mds d’€ de reprise de la dette des hôpitaux ! La Mutualité appelle également à une répartition équitable des 6Mds d’€ entre tous les acteurs de soins (publics, privés non lucratifs et privés).

Où sont les financements de la 5e branche ?

La Mutualité se félicite de la création d’une cinquième branche de la Sécu pour la prise en charge du grand âge. Toutefois, elle regrette que les financements ne soient toujours pas précisés par le Gouvernement et reportés à 2021.

Suppression du fonds CSS (complémentaire santé solidaire, ex-CMU) financé à 100% par les complémentaires santé.

La Mutualité Française prend acte de la suppression du fonds de la complémentaire santé solidaire (Fonds CSS), financé à 100 % par les complémentaires. Cependant, tout en soulignant la volonté de simplification affichée par cette mesure, la Mutualité Française doute de sa capacité à atteindre son objectif, ceci dès lors que les missions sont réparties entre trois entités : le ministère des Solidarités et de la Santé, la CNAM et l’ACOSS. Auquel cas, cette réforme de simplification risque dans les faits de compliquer le système et enlever de la lisibilité mais aussi de la transparence.

Des avancées concrétisées

La Mutualité Française salue en revanche un certain nombre de mesures parmi lesquelles la traduction des négociations du « Ségur de la Santé » sur la revalorisation des professionnels des hôpitaux et des Ehpad à hauteur de 8,8 Mds€ et l’inscription au budget 2021 de la Sécurité sociale du doublement du congé paternité, qui représente une avancée concrète pour l’égalité femme-homme et le bien-être des enfants.